A quoi sert le legal design ?
Le legal design casse les codes de la réglementation, tout en respectant le fond du droit, pour y amener transparence, clarté et souveraineté utilisateur.
Dans l’absolu, et idéalement, toute personne devrait comprendre la règle juridique qui lui est adressée.
Malheureusement, il n’en est rien. En effet, le droit est la plupart du temps jargonneux et difficile à appréhender : phrases longues, renvois vers d’autres articles, pas de définition de termes, la liste est longue.
Dans le meilleur des cas, il intrigue, dans le pire des cas, il crée du rejet. Les conséquences ne sont pas anodines. Il ne sera pas appliqué correctement, voire pas du tout, fragilisant petites et grandes organisations ou bien il continuera à pénaliser celles et ceux qui n’ont pas les clés pour le déchiffrer.
Or, dans une démocratie qui mérite son nom, le droit ne peut se contenter d’être “la chose des seuls juristes et avocats” selon Weber.
Autrement dit, infuser la culture juridique est une mission d’ordre public et ce, à tous les niveaux parce que :
- le droit n’a de sens et d’utilité que s’il est compris par tous ;
- le droit doit être centré sur les personnes qu’il doit servir ou qui l’utilisent ;
- le droit n’a de raison d’être que s’il est accepté, accessible et applicable.
Conjuguer droit et design, ça marche vraiment ?
Le legal design a pu être perçu comme rock’n’roll ou accessoire par le monde juridique. Par le passé, le legal design a même été franchement incompris.
Désormais, notre rôle est de sortir le droit de son ornière pour lui redonner sa pleine fonction au service de tous.
La règle d’or ? Mettre l’utilisateur final (le citoyen, l’opérationnel, le client, etc.) au centre de la démarche.
Avant le legal design | Après le legal design |
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Les textes et les services juridiques transmettent la réglementation de façon brute, en termes techniques. Les utilisateurs finaux s’interrogent longuement pour en saisir la portée, le sens et l’application. | Les besoins des utilisateurs finaux ainsi que leur niveau de maturité juridique sont identifiés. Le legal design rend accessibles les informations juridiques et utilise la puissance des neurosciences combinée au design pour qu’elles soient lues, comprises, acceptées. |
La méthode du legal design est extrêmement cadrée. Ici, les recherches utilisateurs et les données font la loi. En somme, rien n’est laissé au hasard et tout doit être prouvé :
- Découverte :
Immersion dans l’environnement et état de l’art (analyse des principales sources scientifiques ou commerciales) pour comprendre la situation et l’état d’esprit des utilisateurs finaux. Ici, il s’agit de questionner la question, c’est à dire identifier le vrai problème à résoudre ;
- Recherche utilisateurs :
Écoute et recueil des propos et observation des utilisateurs sans les censurer (interview, focus groupe, profils et parcours utilisateurs) ;
- Idéation :
Co-création, avec l’ensemble de l’équipe et des participants, de pistes de solution en fonction de l’analyse de la phase recherches utilisateurs. C’est la magie des ateliers dans lesquels on co-crée avec les utilisateurs ;
- Prototypage rapide :
Création de plusieurs maquettes pour vérifier dans les “faits” si cela résout les difficultés des utilisateurs et si cela répond à leurs besoins ;
- Tests :
Les différents prototypes vont faire l’objet de tests utilisateurs et seront invalidés ou améliorés en fonction des retours des participants ; - Implémentation :
Il existe une version finale qui peut être déployée à grande échelle.
Quelques exemples de résultats en chiffres pour une meilleure efficacité juridique et une gestion des risques plus solide :
- Gain de 2h30 par semaine par juriste chez Renault pour la gestion des processus contractuels
- +92% de compréhension de la politique de confidentialité par les utilisateurs adolescents d’Activision
- 95 % d’adoption à d’un outil de recherche juridique en langage naturel Lefebvre Dalloz
Le saviez-vous ?
Il existe une vague législative à travers le monde qui impose transparence, clarté, accessibilité et capacité des utilisateurs à faire des choix éclairés et libres.
Comment est-ce utilisé aujourd’hui ?
Le legal design est souvent assimilé à des dessins de vulgarisation. Or, cette vision est erronée comme en témoigne la méthode.
D’ailleurs, l’ouvrage Law by Design de Margaret Hagan identifie des degrés différents de mise en application du legal design pour des problématiques plus ou moins complexes.
- Le legal design d’information pour délivrer une information claire et transmettre le bon message au bon moment
Exemple : un schéma juridique, une ligne du temps, etc.
- Le legal design de produit pour créer un outil qui facilite l’accomplissement d’une tâche.
Exemple : une interface de recherche de jurisprudence ou bien encore une application de contract management, etc ;
- Le legal design de processus juridiques pour autonomiser les utilisateurs à se servir du droit et à faire des choix éclairés
Exemple : la création d’une application ou d’une plateforme entre opérationnels et juristes pour améliorer efficacité et expérience utilisateur
- Le legal design d’organisation pour faire collaborer efficacement les personnes ensemble (embauche, rémunération, organisation des relations interpersonnelles, etc.).
Exemple : organisation d’un service juridique avec les autres clients internes ou associer un juriste à un opérationnel afin de rendre la communication et le management des contrats beaucoup plus fluide.
- Le legal design de système pour coordonner des projets d’envergure.
Exemple : création d’un nouveau nouveau tribunal ou d’une organisation numérique fusionnant plusieurs services de l’Etat.
Se former au legal design c’est possible ?
Le legal design est une jeune discipline, et bon nombre de juristes français en ignorent encore l’existence. C’est tout à fait logique puisque cette méthode est née en 2014, année durant laquelle Margaret Hagan, directrice du Legal Design Lab de Stanford, a conceptualisé le “legal design”.
En Europe et en France, les initiatives se multiplient. Le village du legal design, organisé par le Village de la justice, est ainsi proposé lors des journées des transformations du droit, certaines universités offrent des diplômes ou modules de formation et surtout, quelques juristes et avocats comme nous se font les porte-parole de ce mouvement.
Quelques principes à connaître
Empathie | Dessein | Langage clair |
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Capacité à vous mettre à la place de vos utilisateurs. Observez vos utilisateurs finaux et demandez vous : -quel est leur niveau de compréhension du sujet juridique en jeu ? -quels sont leurs besoins, leurs points de friction? -sous quelle forme/quel support sont-ils le plus susceptibles de “consommer” l’information ? | Définissez un objectif clair et demandez vous : -dans quel but souhaitez-vous mettre en place un nouveau document / processus ? -exemples : faire adopter la privacy aux mineurs, améliorer la communication avec les opérationnels, être moins sollicité par téléphone par vos clients ? Bref, le scope est très large. | Langage qui permet aux utilisateurs d’identifier rapidement l’information qu’ils cherchent, de la comprendre aisément à la première lecture, et de savoir quoi faire avec. C’est une discipline académique à part entière, mais voici quelques tips de base. – utilisez la voix active et des pronoms trouvez des titres parlants ou sous forme de question écrivez des phrases courtes en conservant le sujet et le verbe ensemble et en privilégiant des verbes d’action testez la compréhension auprès de vos utilisateurs |